Faire affaire en Asie: entre modernité et tradition
Ils ont beau faire affaire avec l’étranger depuis plusieurs décennies, les grands marchés asiatiques tels que la Chine ou le Japon respectent encore une tradition bien ancrée, qui conditionne leur rapport au monde… et à l’exportation. Victor Dulait, Area Manager de l’Asie de l’Est chez hub.brussels, vous en dévoile les subtilités.
Interview avec Victor Dulait, Area Manager pour l’Asie de l’Est
Que faut-il savoir avant d’exporter en Asie?
V.D.: Ne fut-ce qu’en raison de leur taille, les marchés asiatiques représentent de nombreuses opportunités, qui s’accompagnent naturellement de certains obstacles. Ainsi, le Japon et la Chine, considérés comme des grands marchés, n’en restent pas moins lointains, tant géographiquement que culturellement.
Exporter en Asie demande par conséquent un gros travail préparatoire, d’un point de vue culturel. Car même si votre produit ou service a toutes les chances de trouver un écho sur le marché, votre entreprise devra en gagner la confiance au préalable. Les pays d’Extrême-Orient ont beau importer et exporter depuis des décennies, ils observent une série de règles tacites qui leur sont propres.
Une ou deux différences culturelles à noter afin de ne pas faire de faux pas?
On ne soulignera jamais assez l’importance de la relation. Celle-ci doit être anticipée et préparée, bien avant votre arrivée dans le pays. Une citation est d’ailleurs propre au marché asiatique: One shot, too short.
Il faut se rendre sur place, aller à la rencontre de vos prospects, échanger, partager un repas, un verre, une soirée… et ne négliger aucun aspect de la relation.
Une particularité, commune à toute l’Asie pacifique: l’échange des cartes de visite. En apparence banale, ce geste revêt une importance cruciale pour les Asiatiques. Ainsi, la coutume veut que vous présentiez votre carte de visite en la tenant avec les deux mains ; une marque de respect dans la culture asiatique. De même, votre carte de visite devra être tournée de façon à ce que votre partenaire puisse la lire, et se trouver à hauteur inférieure de la sienne, en admettant qu’il/elle vous la présente au même moment. Ces gestes, en apparence anodins, feront la différence entre un échec et un succès dans votre projet d’exportation.
Le métier d’Area Manager, ça consiste en quoi?
En tant qu’Area Manager pour l’Asie de l’Est, je couvre de larges territoires, tels que la Chine, le Japon, la Corée ou encore la Mongolie. Les Area Managers de hub.brussels travaillent sur deux volets intrinsèquement liés:
- Le helpdesk: nous éclairons les entreprises basées à Bruxelles sur leurs questions liées à l’exportation.
- L’accompagnement collectif: nous organisons divers événements à l’international afin de donner une visibilité aux entreprises bruxelloises et de les introduire sur un marché spécifique: missions, salons, séminaires…
Comment collaborez-vous avec les Attachés Économiques et Commerciaux basés sur place?
Entre les Attaché.e.s Économiques et Commerciaux.ales et les Area Managers, c’est un travail d’équipe quotidien. La grande différence est que les Area Managers sont basés à Bruxelles et dès lors en contact direct avec les entreprises bruxelloises souhaitant s’exporter. Nous faisons donc le lien entre ces dernières et l’AEC du marché ciblé. De même, c’est à nous que revient la mission d’aiguiller les entreprises bruxelloises vers tel ou tel marché, en fonction de leurs desiderata et, surtout, de leur potentiel d’exportation.
Les AEC prennent ensuite le relai, en renseignant les entreprises sur les spécificités des marchés sur lesquels elles souhaitent lancer leurs produits ou services. Résidant dans le pays ou la capitale, ils/elles possèdent une connaissance pointue du marché et de son contexte et disposent d’un large réseau de partenaires potentiels avec lequel connecter les exportateurs.trices bruxellois.e.s.
Quel accompagnement proposez-vous aux entreprises bruxelloises souhaitant exporter en Asie de l’Est?
Nous suivons les entreprises avant, pendant et après leur mission d’exportation.
Au niveau individuel, nous les challengeons sur leur plan d’exportation: sont-ils aptes à exporter? Le marché qu’ils ont en ligne de mire est-il adapté à leurs produits?
Il arrive en effet que des entrepreneur.e.s viennent nous voir avec une idée fixe quant à leur destination d’exportation, mais qui n’est pas du tout en adéquation avec leur offre.
De même, nous encourageons les entreprises souhaitant exporter à se tester en premier lieu dans des marchés limitrophes, tels que la France ou l’Allemagne. De cette façon, ils travaillent déjà à se faire un nom sur des plus petits marchés. L’Asie est en effet un marché de grande exportation.
Au niveau collectif, nous proposons aux entreprises de nous accompagner lors de salons et missions à l’étranger. Celles-ci, souvent organisées avec d’autres partenaires et très médiatisées, sont des outils de prospection, tant pour nos services que pour les entreprises participantes. Nous leur offrons en effet aux une visibilité non négligeable à moindre frais.
Les séminaires tenus lors des missions sont autant d’opportunités de créer des partenariats et débouchent souvent sur des rendez-vous B2B.
Concrètement, quel accompagnement propose-t-on en cas de crise, tel que dans le cas du coronavirus?
Nous veillons avant tout à aligner notre communication avec celles des autorités régionales telles que le SPF Affaires étrangères ou l’Organisation Mondiale de la Santé, qui nous informent en temps réel de l’évolution de la situation. Nous avons également sur notre site web une page consacrée à l’impact du coronavirus sur nos activités à l’international, que nous mettons régulièrement à jour.
Certes, l’impact économique d’un tel virus est interpellant. Toutefois, du côté bruxellois, l’inquiétude ne se fait pas encore trop ressentir. Déjà parce qu’une économie de services est moins dépendante d’approvisionnements venant de la Chine. Ensuite parce qu’exporter ne se fait pas en un jour: les entreprises ayant jeté leur dévolu sur la Chine reportent leur voyage de prospection ou se s’intéressent à d’autres marchés. Les entreprises bruxelloises implantées en Chine voient certes leurs chiffres diminuer, mais ont bon espoir que les affaires reprennent dès le deuxième semestre.
Notre travail de mise en relation et de prospection continue virtuellement, dans l’attente d’une rencontre en face-à-face, dénuée de tout danger sanitaire.
Victor Dulait est diplômé en sciences politiques, en relations internationales et en droit. Après ses études, il travaille un temps en Chine, ce qui lui permet de se familiariser avec le pays. Il occupe depuis 2017 la fonction d’Area Manager pour l’Asie de l’Est chez hub.brussels.